Ne justifie pas d’un intérêt lésé le requérant qui a pu utilement présenter une offre qui a été classée et qui a eu la même note que la société attributaire sur la valeur technique

Le pouvoir adjudicateur qui a respecté le délai fixé dans le règlement de la consultation pour la modification du dossier de consultation des entreprises ne peut pas se voir reprocher d’avoir méconnu le principe d’égalité de traitement des candidats.

Par ailleurs, dès lors que le requérant a pu présenter utilement une offre qui a fait l’objet d’un classement, la prolongation du délai de remise des offres, eu égard à sa portée et au stade de la procédure auquel elle se rapporte, ne l’a pas lésé et n’est pas susceptible de l’avoir lésé.

Enfin, le requérant, qui soutient que les sous-critères de la valeur technique ne sont pas en lien avec l’objet du marché public, n’a pas pu être lésé, dès lors que sur la valeur technique il a eu la même note que la société attributaire.

Tribunal Administratif d’Amiens, 09 janvier 2017, requête n°1603749

MOTS-CLÉS : marchés publics, référé précontractuel, intérêt lésé, délai de remise des offres, critère d’évaluation des offres, juriadis, avocat

En référé précontractuel, le juge annule la procédure de passation d’un marché public, dès lors que le pouvoir adjudicateur a attribué le marché à une entreprise qui avait modifié son offre de prix en-dehors de toute négociation.

Une communauté de commune a lancé une consultation pour un marché public de travaux. Elle a ensuite demandé à plusieurs entreprises de préciser leurs offres, s’agissant notamment des quantités sur la base desquelles elles avaient établi leur offre, comme cela est permis aux termes de l’article 59 du code des marchés publics.

A cette occasion, l’entreprise qui s’est finalement vu attribuer le marché, a modifié son offre de prix. C’est cette nouvelle offre que le pouvoir adjudicateur a prise en compte dans l’analyse des offres et qui a permis à l’entreprise en question d’obtenir le marché.

Or, si la procédure de l’article 59 du code des marchés publics permet au pouvoir adjudicateur de demander des précisions aux candidats sur la teneur de leur offre dans le cadre d’une procédure orale, elle n’autorise pas le pouvoir adjudicateur à négocier avec les candidats, ni les candidats à modifier la teneur de leur offre écrite. De plus, lorsqu’il met en œuvre cette procédure, le pouvoir adjudicateur doit s’assurer de respecter l’égalité de traitement entre les candidats.

Un concurrent évincé a donc saisi le juge du référé précontractuel et demandé l’annulation de la procédure de passation, en soulevant le moyen tiré de ce que la communauté de communes n’avait pas respecté le principe d’intangibilité des offres en retenant l’offre d’une entreprise qui avait été modifiée en-dehors de toute négociation.

Le juge du référé précontractuel a retenu ce moyen pour prononcer l’annulation de la procédure de passation du marché public, ainsi que la décision d’attribution.

TA Caen, 6 janvier 2017, n° 1602399

MOTS-CLÉS : marchés publics, référé précontractuel, principe d’intangibilité des offres, irrégularité de la procédure de passation, juriadis, avocat

En référé précontractuel, le candidat ayant remis une offre irrégulière ne justifie d’aucun intérêt lésé, si le manquement qu’il invoque n’est pas la cause de l’irrégularité de son offre.

Une communauté de communes a lancé une consultation pour un marché public de travaux dont le règlement de la consultation précisait qu’aucune autre langue que le français ne pouvait être utilisé dans l’offre, y compris les pièces jointes, sauf à être traduite.

Une des sociétés candidates, dont l’offre a été analysée et classée par le pouvoir adjudicateur, a entendu contester la décision de rejet de son offre devant le juge du référé précontractuel.

Le pouvoir adjudicateur a alors soulevé le moyen tiré de ce que son offre étant irrégulière, elle ne justifiait d’aucun intérêt lésé de sorte que sa requête devait être rejetée.

En effet, la société requérante avait produit, à l’appui de son offre, un document technique en italien et en anglais, non accompagné de traduction, contrairement à ce qui était exigé par le règlement de la consultation qui imposait la communication de documents exclusivement rédigés en langue française.

La société requérante a donc tenté de contrer le moyen soulevé par le pouvoir adjudicateur en invoquant l’irrégularité de l’exigence de production de documents techniques particuliers, dès lors que cette exigence a limité les produits utilisables à certains fabricants et donc l’accès à la commande publique. Elle espérait ainsi démontrer que le pouvoir adjudicateur avait commis un manquement à ses obligations en matière de mise en concurrence, en ce qu’il aurait limité l’accès à la commande publique, et que ce manquement était la cause de l’irrégularité de son offre.

Toutefois, le juge administratif va écarter ce moyen, au motif que le pouvoir adjudicateur avait précisé, dans le règlement de la consultation, que les candidats pouvaient produire d’autres documents techniques que ceux décrits dans le cahier des clauses techniques particulières et que la société requérante aurait dû produire une traduction du document technique qu’elle avait produit.

Ainsi, le pouvoir adjudicateur n’ayant commis aucun manquement à l’origine de l’irrégularité de l’offre de la société requérante, celle-ci ne justifiait d’aucun intérêt lésé. Le juge des référés a conclu au rejet de la requête.

TA Caen, 6 janvier 2017, n° 1602426

MOTS-CLÉS : marchés publics, référé précontractuel, intérêt lésé, offre irrégulière, juriadis, avocat

Avocat Caen

MARCHES PUBLICS

Avant de rejeter une offre anormalement basse, le pouvoir adjudicateur doit préalablement demander les précisions qu’il juge utile pour vérifier les justifications fournies.

La Commune de L a engagé une procédure adaptée en vue de la conclusion d’un marché de prestations de services.

L’offre de la Société J a été rejetée comme étant anormalement basse.

Le tribunal retient l’illégalité de cette décision en estimant que pour rejeter l’offre comme anormalement basse la Commune devait au préalable inviter le candidat à lui fournir des explications concernant le prix de ses prestations en application de l’article 55 du Code des marchés publics alors applicable lequel disposait que « si une offre paraît anormalement basse, le pouvoir adjudicateur peut la rejeter par décision motivée après avoir demandé par écrit les précisions qu’il juge utile et vérifier les justifications fournies… »

Références : TA MONTPELIER 8 Juillet 2016.

Mots clés : Marchés publics, offre anormalement basse, justification.

Les tiers à un contrat ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l’intérêt lésé dont ils se prévalent.

Le Centre Hospitalier X a conclu un marché public avec la Société Y en vue de la fourniture de matériel informatique. La Société Z, concurrent évincé, a contesté la validité de ce marché devant le tribunal administratif. C’est l’occasion, pour la juridiction, de rappeler les conditions dans lesquelles un marché peut être contesté ainsi également que les conditions dans lesquelles des moyens classiques peuvent être soulevés. Par son premier considérant, le tribunal a d’abord clairement rappelé les conditions dans lesquelles un marché public pouvait être contesté. Il retient la motivation suivante :

 « Considérant qu’indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le Juge de l’excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d’un contrat ou devant le Juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du Code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le Juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ces clauses non réglementaires qui en sont divisibles ; que cette action devant le Juge du contrat est également ouverte aux membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concernées ainsi qu’au représentant de l’Etat dans le département dans l’exercice du contrôle de légalité ; que les requérants peuvent éventuellement assortir leur recours d’une demande tendant sur le fondement de l’article L.521-1 du Code de justice administrative, à la suspension de l’exécution du contrat; que ce recours doit être exercé, y compris si le contrat contesté est relatif à des travaux publics, dans un délai de    2 mois à compter de l’accomplissement des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d’un avis mentionnant à la fois la conclusion du contrat et les modalités de sa consultation dans le respect des secrets protégés par la loi ; que la légalité du choix du co-contractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de la signer ne peut être contestée qu’à l’occasion du recours ainsi défini ; que, toutefois, dans le cadre du contrôle de légalité, le représentant de l’Etat dans le département est recevable à contester la légalité de ses actes devant le Juge de l’excès de pouvoir jusqu’à la conclusion du contrat, date à laquelle les recours déjà engagés et non encore jugés perdent leurs objets ;

Considérant que le représentant de l’Etat dans le département et les membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement des collectivités territoriales concernées, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l’appui du recours ainsi défini; que les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l’intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d’une gravité telle que le Juge devrait les relever d’office ».

C’est donc à la lumière de ces conditions de recevabilité que le tribunal a pu notamment examiner trois moyens. Le premier était tiré de l’irrégularité de l’avis d’appel public à la concurrence. La Société requérante soutenait en effet que cet avis d’appel public à la concurrence ne comportait pas les informations nécessaires. Le tribunal rejette néanmoins le moyen en estimant que « toutefois, elle n’établit pas en quoi ce manquement allégué de la personne publique à ces obligations de publicité et de mise en concurrence, l’aurait lésé ou aurait été susceptible de l’aléser eu égard à sa portée et au stade de la procédure auquel il se rapporte ».

La Société requérante soutenait, en deuxième lieu, que le marché aurait dû être alloti. Cependant, le tribunal retient que l’exception à l’allotissement est possible dès lors que « L’allotissement aurait rendu techniquement  plus difficile l’exécution de la prestation ; que, par suite, le pouvoir adjudicataire n’était pas tenu d’allotir ce marché public… ».

A cet égard, le tribunal a rappelé que si le décret N° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif au marché public impose au pouvoir adjudicataire, qui décide de ne pas allotir un marché public répondant à un besoin dont la valeur est égale ou supérieure au seuil de procédure formalisée, de motiver son choix dans les documents de la consultation ou le rapport de présentation, ce décret n’est entré en vigueur qu’à compter du 1er avril 2016, de sorte qu’il n’est pas applicable au marchés public litigieux. Enfin, le tribunal a pu également rappeler que si le pouvoir adjudicataire a l’obligation d’indiquer dans les documents de consultation les critères d’attribution du marché et leurs conditions de mise en œuvre, il n’est en revanche pas tenu d’informer les candidats sur la méthode de notation des offres.

Le tribunal rejette la requête.

Références : TA CAEN 9 Juin 2016, requête n° 1500101.

Mots clés : Marchés publics, contestation de la validité d’un contrat, allotissement, vice en rapport direct avec l’intérêt et lésé, manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence, allotissement.

 

Le dossier d’un candidat à l’obtention d’un marché public de travaux dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres est irrégulier et peut être éliminé si son contenu s’avère non conforme aux stipulations du CCTP.

La Société X a demandé au tribunal administratif d’annuler la procédure d’appel d’offres lancée par une Commune en vue de l’attribution d’un marché de travaux publics au motif que son offre avait été illégalement déclarée irrégulière en application de l’article 35-I du Code des marchés publics.

Précisément, l’article 1.7 du CCTP applicable stipulait que les travaux devaient être réalisés en deux phases successives.

Or, le dossier de candidature présentait un programme prévisionnel des travaux prévoyant la réalisation partiellement simultanée des deux phases d’exécution.

Le tribunal a estimé que :

« …la non-conformité de l’offre de la Société X auxdites stipulations a pu être valablement retenue ; que, dans ces conditions, la société n’est pas fondée à invoquer des manquements à la mise en concurrence… ».

A cet égard, le tribunal a également estimé qu’était inopérant le moyen développé par la société requérante selon lequel les travaux pouvaient parfaitement être réalisés de façon simultanée.

Références : TA CAEN 20 Janvier 2016, requête N° 1502544.

Mots clés : Marchés publics, travaux publics, dossier de candidature, référé précontractuel, composition du dossier, offre irrégulière.

N’est pas recevable un dossier de candidature pour l’attribution d’une délégation de services publics qui ne comporte pas dans son dossier de référence significative de nature à justifier des garanties techniques et professionnelles exigées par l’avis d’appel public à la concurrence.

La société X a demandé au tribunal administratif d’annuler la procédure d’appel d’offre lancée par une commune en vue de l’attribution d’une délégation de services publics portant sur la gestion et l’exploitation d’une base de loisirs.

Elle soutenait notamment que la société retenue ne justifiait pas de référence suffisante pour être déclarée recevable alors que le règlement de consultation mentionnait que le dossier de candidature devait comporter, en ce qui concerne la capacité technique et professionnelle du candidat « une information permettant d’apprécier ses capacités techniques et professionnelles (exemple : référence du candidat en matière d’exploitation et de gestion de services de tailles comparables ou autre référence pertinente) ». Le tribunal administratif annule la procédure en retenant que la société retenue, « Avait pour activité principale la réalisation de béton décoratif et que l’activité principale de son établissement principal était l’entretien et la création d’espaces verts, qu’elle citait une seule référence, par ailleurs sans lien direct avec l’objet de la délégation, soit une « intervention sur le chantier », qu’elle ne disposait d’aucune référence en matière d’exploitation de base de loisirs, qu’elle disposait de moyens humains limités alors que ses moyens techniques n’étaient pas précisés, le candidat prévoyant de s’appuyer sur les moyens humains de la délégation des services publics ».

Le tribunal en a tiré la conséquence que la société retenue ne justifiait pas de garantie technique et professionnelle telle qu’exigée par l’avis d’appel public à la concurrence.

La procédure a été annulée.

Références : TA CAEN 30 Décembre 2015, requête N° 1502386.

Mots-clés : délégation de service public, composition du dossier, référé précontractuel, dossier de candidature.